Lune


I

Chaque nuit la lune

Fait l'amour avec la mer

Pour que dansent les sirènes

II

Lune rousse

Roses rouges roses roses

Lune brune

L'amour s'endort au fond des bois

Lune blanche

Vraie couleur de la lune

Qui éclaire la ville

Et son cimetière

III

Comme un silencieux serpent

La lune de miel ou d'argent

Endort encore le printemps

IV

La porte du cimetière

Reste ouverte

La lune est voilée


V

La mer est lourde d'écume

Et de vestiges de naufrages

La lune blonde

Refait le lit

Et sourit


VI

La lune coule

Comme une larme

Surgit des yeux d'une étoile lointaine

VII

Le sable est une dernière étape

Avant la mer

Le sable est une dernière étape

Avant la mort

Dans le ciel

La lune porte à son cou

Un grand collier de perles

Et d'étoiles

VIII

C'est nuit noire

La lune

Et les étoiles

Sont parties à l'enterrement

Du jour

IX

La lune est fatiguée de recommencer chaque soir

Elle se ferme comme un vieux coquillage

Et garde en elle

Sa dernière lueur

X

Toutes mes pensées s'enfuient

De la tête vide de la lune

XI

Nos âmes blanches parcourent le ciel

Et cherchent à retourner sur terre

La lune monte la garde

XII

Bonne nuit Lune

Avant que de t'endormir

N'oublie pas combien t'aiment

Le poète

XIII

La lune est dans tous ses états

Mais le soleil

Ne le sait pas

Il inonde la mer

Et donne aux poissons

Des écailles vertes

XIV

Les nuages

Tracent le ciel

De nos souvenirs

Bleus blancs noirs

La lune tient la caisse

Et ne rend pas la monnaie

XV

Pomme verte

Pomme jaune

Pomme d'api

Le vers est dans la pomme

L'étoile est dans la lune

Elle ne voit pas passer son heure

Et s'éteint

Lune rousse

Lune blonde

Lune brune

La lune est dans les pommes

XVI

Un trou

Au fond du trou un corps

Avec la lune comme linceul

XVII

Le corps était dans la tombe

Et regardait la lune

XVIII

La lune s'est tranchée

Les veines

Et dans chaque torrent désormais

Coule la lumière d'une source défunte

XIX

Depuis que tu es partie

Il fait nuit

Noire

Seule la lune

Immense tarentule noire

Veille sur moi

Et me caresse les cheveux

XX

La terre

Fleur bleue

Tourne sur elle-même

Elle entraîne les hommes

Dans une folle farandole

Pendant ce temps

Plus haut

Là haut

La nuit

La lune

S'ennuie

Un seul pas d'homme

Marque son sol

XXI

Le jour

Le bruit des canons

La nuit

Le bruit des canons

Les fleurs sont rouges

Les larmes

Dans les yeux des femmes

Sont rouges

Là haut

La lune pleure

XXII

C'est l'hiver

La neige recouvre le sol

D'un lourd manteau

D'astrakan

Blanc

Ailleurs

La canicule règne depuis de longs jours

Les fleuves pleurent

Le souvenir des dernières gouttes

D'une lointaine pluie

La lune infidèle

Parcourt les paysages

Tantôt tête nue

Tantôt vêtue d'un chapeau haut de forme

Mais les hommes ne la voient pas

Les hommes ne lèvent plus les yeux depuis longtemps

XXIII

Derrière chaque vivant

Il y a une ombre de lune

Qui l'imite

XXIV

La lune

C'est tes yeux

Mais les nuages bousculent le ciel

Alors ?

Le soleil

C'est tes seins

Mais tes seins sont des oreillers

Alors ?

Je voudrais dormir sur tes oreillers de plume

Mais les chants de la rue montent

Au clair de la lune

Mon ami Pierrot

J'écris avec le bec d'un oiseau lune

Trempé dans l'eau

Quand le soleil se lèvera

J'aurai les yeux fermés

Je serai vieux

XXV

La lumière des étoiles

La fumée des cigarettes

Le vent

Et le vert des arbres

Sont nos vrais compagnons

Et pourtant

Nous passons nos rires et nos caresses

Et nos rides

Dans les bras ensorceleurs des femmes

Nous ne savons pas qu'existe pour chacun de nous

Une lune vierge

Où nous pouvons dormir

XXVI

Dans le ciel voguent de grands ballons blancs

Et de grands ballons rouges

Lune blanche lune rousse

Qui a lâché le fil de la lune ?

XXVII

La lune est morte

Nous allons l'enterrer

C'était une grande prétentieuse

Qui ne se montrait que maquillée

Avec de grands colliers d'étoiles

La lune est morte

Quelle tête fera le ciel demain

Au coucher du soleil

Quand les étoiles danseront

Seules dans le noir ?

XXVIII

La lune c'est l'air

Ni le fleuve ni la femme

N'arrivent à posséder

Des courbes si parfaites

La lune c'est l'or

Ni le blé ni tes cheveux

N'arrivent à surpasser

Sa couleur blonde


La lune c'est la lumière

Ni le jour ni ton rire

N'arrivent à éclairer

Ma vie d'une telle ombre

La lune c'est le rêve

Elle monte dans ma tête

Jusqu'aux cimes bleues

Où tout s'évanouit

XXIX
Je dormais silencieux

Je rêvais que je rêvais

Et pourtant j'étais là

Seule la lune savait que j'existais

Qui a fermé les volets ?

XXX

Je nais déjà grande

Et regarde la terre dans les yeux

Je me souviens des nuits

Que j'ai déjà vécues

De vos draps humides

Et des baisers partagés

Il fera jour demain

Et sans regret

J'irai mourir de l'autre côté de la terre


© Franck SIMON
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