Le jour suivant
I
Toi qui ce soir danse debout sur ce bar
Accompagnée d'une seule guitare
Et vêtue telle la reine de Saba
Un jour qui n'est pas loin viendra
Un jour où monsieur le curé en offrande
Aura oingt ton front
Et où tu dormiras dans ton drap profond
Pendant que ton âme parcourra la lande
Enfin dans ton cercueil telle une éternelle soumise
Suivie de près par tous tes ex amants
Tu graviras lentement les marches de l'église
Le soleil ne te caressant plus les flancs
II
Et maintenant les cloches de bronze sans trêve
Réveillent la ville de leur son douloureux
Pour annoncer qu'une femme de rêve
Vient de traverser le Nil furieux
Mais la ville est sourde
Et telle une palourde
Rejette à la mer après s'être nourrie
Les particules mortes et pourries
III
La musique de l'orgue leur répond en écho
Forte troublante
Et chacun autour de toi éprouve la tourmente
Chacun voudrait encore te bercer de ses mots
Mais tout est dit règne enfin le silence
Et sous ton drap noir tu vas rester seule dans ton néant
La porte est-elle ouverte sur un bel océan
Ou bien découvre-t-elle un orifice béant ?
Néant ! Néant !
La piste est fermée maintenant à la danse
Le prêtre enfin t'absout
Moyennant - pour le denier du culte - quelques sous
Pardonnés tes paradis d'amour
D'autres prendront ta place demain un jour
IV
Car toi maintenant tu vas aller pourrir
Comme un animal mort
Car le bois même de chêne est bien piètre protection
De toi les vers vont se nourrir
Tel est maintenant ton sort
Plus personne ne prononcera ton nom
La belle enfant dansant hier à moitié nue
Et le chien bâtard mort au coin de la rue
Sont désormais même chose
Charognes sur lesquelles poussent les roses
Tes cuisses avides tomberont en lambeaux
Découvrant de magnifiques os
Tes seins nourriciers resteront arides
Ta peau hier tendue se couvrira de rides
Tes mains tes bras
Rien ne résistera
Dans les trous de tes yeux bleus jadis
Soufflera le vent pousseront les radis
Seul te restera le rire aux dents
Mais pour encore combien de temps ?
V
Et par ces longues soirées d'été
Pendant que toi seule ignorée de tous
Verra ton corps partir dessous la mousse
Ces messieurs qui pour toi se pâmaient
Pour une autre blonde à la peau claire aux lèvres rouges
Ressortiront leurs discours « tu es l'amour quand tu bouges »
La nature pendant ce temps continuera son sort
Construire le jour avec les particules des morts