Cent mille
De ma plume oiseau-lyre
Trempée dans l'encre de myrrhe
Je t'écrirai cent mille chansons
Pour te chanter cent mille saisons
Les bleus portant haut le ciel
Découvrant devant nous l'horizon
Les jaunes offrants aux abeilles le miel
Tartiné sur de vieux croûtons
Les rouges partagés par l'éclair
Redonnant le mouvement à la paresse des mers
Et des vertes des grises ou des noires
Faisant ressembler la nuit à la pâleur d'un soir
Cent mille chansons semblables à nous deux
Cent mille chansons refrain des amoureux
Où l'on parle du bateau perdu te retrouvant comme port
Où l'on parle d'un roi t'abandonnant son or
Où les maisons sont tes palais de nacre
Et les fleurs les couronnes de ton sacre
Où les feux de la guerre se transforment en artifice géant
Et les larmes ne sont plus que le doux souffle du vent
Où les profondes cicatrices de la terre
Donnent naissance aux blés remède à la misère
Cent mille mots nouveaux prononcés par nos voix
Cent mille tableaux en arabique gouache
Cent mille mois de juin pour prolonger le printemps
Cent mille chercheurs d'or pour l'or de tes yeux
Je t'écrirai cent mille chansons
Cent mille canaux pour t'inventer Venise
Cent mille arcs-en-ciel pour repousser l'orage
Cent mille graines d'amour à germer dans nos doigts
Cent mille essences nouvelles à fendre de ma hache
Cent mille senteurs nouvelles pour t'envoûter l'encens
Cent mille paysages pour parcourir mille lieux
Cent mille mots d'amour pour payer ta rançon
Cent mille éventails pour recréer la bise
Cent mille barreaux d'acier pour me mettre en cage